Buy American ? Buy Canadian ! Inquiète de l’impact que pourraient avoir sur son essor les clauses tout juste adoptées par les États-Unis favorisant l’approvisionnement intérieur de leur secteur du transport, l’industrie québécoise des véhicules électriques demande à Québec et à Ottawa d’agir. Son souhait : une stratégie renforcée pour accélérer l’électrification au Canada.
Cette stratégie pourrait s’inspirer de l’Inflation Reduction Act (IRA), loi proposée à la fin de l’année dernière par le président américain Joe Biden et dont plusieurs dispositions devant accélérer l’électrification du transport aux États-Unis sont entrées en vigueur au début 2023. C’est ce que proposait lundi matin la p.-d.g. de Propulsion Québec, Sarah Houde.
« Il nous faut une stratégie industrielle verte nationale, une loi de type Inflation Reduction Act canadienne », a demandé Sarah Houde sur scène, juste avant que le premier ministre Trudeau ne vante à son tour les avancées faites par le Canada en matière d’approvisionnement en batteries pour véhicules électriques.
Propulsion Québec réunit pour trois jours à Montréal quelque 1200 représentants du transport durable venant d’ici, d’Europe et d’Asie. Avec une allocution en lever de rideau tôt lundi matin par le premier ministre Justin Trudeau, l’occasion était belle de faire passer le message au gouvernement fédéral.
« Encore aujourd’hui, au Canada, nos principales exportations sont le pétrole et les automobiles. Au Québec, c’est l’inverse : les autos et le pétrole sont parmi nos principales importations. Pour que ça change, il faut une action concertée de l’État », a plus tard ajouté Sarah Houde en entrevue au Devoir.
Tant Justin Trudeau que le ministre québécois de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charette, qui l’a suivi au micro, ont rappelé l’importance de décarboniser le transport dans l’atteinte des objectifs de réduction des gaz à effet de serre du Québec et du Canada. Ils se sont mutuellement félicités d’offrir aux consommateurs une aide à l’achat de véhicules légers électriques, sans plus.
C’est le ministre fédéral de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie, François-Philippe Champagne, qui a réagi à la proposition de Propulsion Québec. La confirmation de l’installation par Volkswagen d’une importante usine de batteries à St. Thomas, en Ontario, est la preuve que le Canada peut bien faire en dépit du protectionnisme américain, a-t-il dit, en substance.
« Il s’agit là d’un important vote de confiance envers le Canada et l’Ontario ainsi qu’envers nos efforts communs pour faire du pays et de la province des chefs de file mondiaux de la chaîne d’approvisionnement des véhicules électriques », a déclaré le ministre Champagne.
Selon certaines sources, la publication le 28 mars prochain du budget fédéral devrait en révéler davantage sur la façon dont Ottawa compte venir en aide à l’industrie du véhicule électrique en réaction à l’IRA états-unien.
Pour étayer sa demande, Propulsion Québec renvoie à un plan d’accélération du développement du transport durable, que l’organisme a publié en juin dernier. Ce plan, qui est présenté comme « une véritable politique industrielle », est le fruit d’une consultation auprès de 200 représentants du secteur québécois du transport zéro émission.
Il se découpe en huit grands thèmes. Ceux-ci concernent aussi bien la formation d’une expertise locale capable de concevoir, de tester et de commercialiser des technologies vertes adaptées pour le transport, qu’un renforcement de la filière batterie qui est en train de se créer, lentement mais sûrement, dans la région de Bécancour. Un meilleur accès à du capital pour financer des investissements d’envergure est un autre souhait formulé à travers ce plan d’action.
Pour convaincre les gouvernements du Québec et du Canada d’accéder à ses demandes, Propulsion Québec indique que l’industrie qu’il représente est déjà en forte croissance : l’industrie du transport électrique compte plus de 9000 employés au Québec, et son chiffre d’affaires a été multiplié par trois depuis 2020. Il est quatre fois supérieur à celui de l’industrie québécoise du jeu vidéo.
Ralentie par une rareté des véhicules zéro émission disponibles, l’électrification du transport prend l’allure à l’échelle mondiale d’une course dans laquelle les pays qui offrent l’aide à l’achat la plus généreuse prennent rapidement les devants. À ce jeu, les États-Unis ont frappé un grand coup en adoptant deux crédits à l’achat qui s’élèvent, selon la taille du véhicule, à 7500 $US et à 40 000 $US.
Plutôt généreuse, cette mesure rend notamment les véhicules commerciaux électriques aussi abordables que les véhicules à moteur thermique. Elle devrait convaincre des entreprises possédant un important parc de véhicules, comme des sociétés de livraison, de passer à l’électrique et à l’hydrogène le plus tôt possible.
Cette aide comporte toutefois au moins deux limites : entre 50 et 100 % des matériaux composant les batteries des véhicules admissibles doivent avoir été fabriqués en Amérique du Nord. Entre 40 et 80 % des minéraux allant dans leur composition devront être d’origine nord-américaine également.
À cela s’ajoutent des dispositions prises plus tôt par Washington pour favoriser l’achat de véhicules assemblés aux États-Unis. L’objectif du président Biden est de créer une chaîne d’approvisionnement indépendante de fournisseurs chinois, qui produisent pour le moment la part du lion des pièces de véhicules électriques. Selon la Maison-Blanche, cela s’est traduit par des promesses d’investissement aux États-Unis de plus de 100 milliards de dollars américains par les différents acteurs du transport électrique.
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